Le tissage, qui est surtout une activité à temps partiel exercée en hiver, est tributaire d'une série de préparatifs auxquels participent tous les membres de la famille. Les hommes tondent les moutons au début du printemps, moment où la laine est la plus épaisse. Celle-ci est apportée à une cardeuse où elle est nettoyée et démêlée, puis renvoyée à la ferme pour la filature. Le lin nécessaire à la confection de tissus est planté au printemps et sarclé par les enfants en été, avant d'être récolté à la fin d'août. On enlève les graines avec un peigne, on trempe le lin pour détacher les fibres, puis on bat la tige avec un bâton pour séparer les fibres de l'écorce et du coeur de la tige. On peut ensuite carder les longues fibres en prévision de la filature. Qu'elles utilisent de la laine ou de la fibre de lin, la fermière et ses filles consacrent environ huit à dix heures de filature pour produire assez de fil correspondant à une seule heure de tissage.
Le métier à tisser comporte quatre poteaux de bois reliés à leurs parties supérieure et inférieure pour former une charpente en forme de boîte de la taille approximative d'un lit pour deux personnes. La chaîne se déroule à partir d'une bobine à l'arrière, tandis qu'une autre bobine à l'avant recueille l'étoffe. Pour tisser cette dernière, la fermière fait passer une navette contenant le fil de trame en un mouvement de va-et-vient à travers la chaîne, en utilisant des pédales pour soulever et abaisser les fils. Le tisserand tire un battant suspendu à la partie supérieure du métier contre la trame pour pousser fermement chaque fil contre l'étoffe déjà tissée. Selon l'épaisseur du fil, il peut falloir 40 passages de la trame pour produire quelques centimètres de tissu. Un bon tisserand peut fabriquer environ trois mètres de tissu par jour, mais des ajustements du métier et les réparations d'une chaîne ou d'une trame brisée peuvent ralentir le processus.